mardi 20 octobre 2020

Liberté.

 

J’ai vu beaucoup de mes coreligionnaires (ou pas) s’interroger sur la liberté d’expression, en ces temps troublés.

A l’heure où on décapite un professeur de l’éducation nationale pour avoir osé montrer des caricatures d’un journal satirique, dans le cadre d’un cours sur cette fameuse liberté d’expression, j’en vois beaucoup qui bien que scandalisés/meurtris/outrés (choisir la mention qui va bien) par cet acte ignoble/barbare/d’un autre temps/incompréhensible (idem) se posent la question de « et quand Charlie se moque de la shoa… »

 

A ceux-là, j’ai envie de leur poser la question (qui aurait pu être posée à ces élèves de 4ème…) : Que représente la liberté d'expression pour vous ?

J’ajouterais même, tant qu’on y est : Comment définissez-vous le genre "caricature" d'un dessin ? Et la satire ? un avis ?

En fait, que ça plaise ou non, la satire, fait partie intégrante (et non négociable fort heureusement) de la liberté d'expression.

Elle pousse à interroger les certitudes.

Elle pousse la « bien-pensance » dans ses retranchements.

La liberté d’expression ce n’est pas seulement le droit de râler quand on est mécontent, c’est sortir de sa zone de confort, et pousser à la réflexion.

Réflexion. Quand on y pense : c’est ce qu’on voit dans le miroir.

Un miroir qui vient grossir tous les défauts comme dans une caricature, justement.

Ah oui, ça ne fait pas plaisir, une caricature. Ce n’est pas un plaisir de voir en grand ce qu’on cherche à faire tout petit.

Pourtant, c’est vital dans une société.

Sans elle, on resterait sur "nos acquis".

Même si je peux comprendre que certaines de ces caricatures heurtent certaines sensibilités. (Jamais testé, ça fait mal la sensibilité quand on la heurte ? Sur une échelle de 1 à 10 par exemple ?)

Un peu comme, au cinéma quand on prévient "que certaines scènes peuvent heurter la sensibilité des plus jeunes".

Alors, dans ce cas, on évite de regarder ces scènes. On est prévenu.

C'est exactement ce qui se passe avec Charlie. On sait, ce n'est pas caché, c'est un journal satirique. Il cherche à bousculer. Vous ne souhaitez pas être bousculé.es, c'est votre droit le plus strict. Personne ne vous l'enlèvera. Mais attention à ne pas installer un débat là où il n'y en n'a pas.

La France est un pays laïc, de tradition/culture chrétienne.

Et depuis la séparation de l'Eglise et de l'Etat, (et davantage encore depuis 1905) : la religion est de l'ordre du privé.

Conséquence : le blasphème n'existe pas.

Point.

Et c’est ce dont il est question dans l’histoire de ces caricatures. Elles « choquent » parce qu’elles sont « blasphématoires » pour certains.

Or, ceci n’a légalement pas de sens en France.

Ce qui a du sens, en revanche, c’est l’incitation à la haine, c’est le négationnisme : et c’est cela qui fait la différence avec un Dieudonné dont le font de commerce est précisément non pas de « caricaturer la shoa », mais d’en nier l’existence…

Bah oui « il n’y était pas » comme il dit…

Elle est là, la différence entre la liberté d’expression d’un côté et le négationnisme de l’autre.

Entre ce qui est légal (même si ça heurte) et ce qui ne l’est pas.

Donc, ne surtout pas se tromper de combat.

Samuel Paty n’était pas un hors la loi.

Il avait sans doute des défauts d’humain (qui n’en a pas ?), peut-être qu’il s’était fâché parfois avec des amis, disputé avec sa femme, peut-être même qu’il laissait un sacré foutoir dans la cuisine après avoir tenté de cuisiner. Peut-être qu’il mettait du temps à payer ses PV, voir qu’il avait déjà grillé un feu rouge.

Peut-être aussi qu’il était heureux d’enseigner en essayant de transmettre un peu à ses élèves. Peut-être qu’il était content, aussi, de voir certains d’entre eux dépasser leurs limites…

Peut-être qu’il était tout ça, ou pas. Je ne sais pas.

Ce dont je suis certaine, en revanche : c’est que ce n’était pas un hors la loi.

Ce qui a été commis vendredi dernier est l'ultime de la barbarie. Il se savait menacé, et on lui a demandé de ne surtout "pas faire de vague". S'il n'avait pas été tué, il aurait sans doute été sanctionné sous la pression des parents d'élèves.

Vassilia


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